L’école est un lieu de vie où chacun des acteurs, qu’il y soit enfant, parent ou enseignant, doit pouvoir trouver sa place, s’exprimer, être écouté et reconnu, mais aussi savoir écouter et accepter les règles pour bien vivre ensemble.
Donner un réel espace de parole aux enfants
1. Dans les classes maternelles
L’organisation matérielle et temporelle des activités libres du matin vise à faire de l’enfant un membre à part entière du groupe qui se constitue : elle offre des moments privilégiés au cours desquels les enfants se retrouvent, échangent, règlent des conflits sans que l’adulte intervienne forcément.
Ainsi écouté et reconnu dans sa totalité, l’enfant peut à son tour écouter et reconnaître les autres, apprendre à communiquer au travers d’une vie de classe qui laisse à chacun de réelles possibilités de rencontres et d’échanges.
2. La surprise
En grande section, s’institue l’heure de la «surprise» : objet soigneusement emballé qu’un enfant meneur de jeu, tentera de faire deviner aux autres, relayé par l’adulte si nécessaire.
Soupesée, palpée, repérée dans sa forme, commentée, la surprise passe de main en main avant d’être découverte.
On s’écoute, on tire parti des indices donnés, on réfléchit, on suppose, on vérifie en déballant. D’abord objet médiateur pour aborder le groupe, s’y affirmer, s’y faire reconnaître, elle se modifie peu à peu. Elle devient objet déclencheur d’une activité ou d’un intérêt éventuellement approfondi ensuite par l’enseignant.
3. La causerie
Simple présentation orale d’un objet (mâchoire de mouton, équipement nécessaire pour faire du hockey, collection de cailloux rassemblée pendant les vacances, album de photos prises à la ferme…), elle peut aussi être un témoignage plus élaboré (panneaux préparés en famille) d’expériences personnelles vécues hors l’école et qu’on a envie de partager. Ni systématique, ni obligatoire, elle est toujours accueillie favorablement et représente un espace de parole possible au sein de la classe.
4. Quelles nouvelles ?
Dès que l’âge de l’enfant le permet, sur un rythme quotidien ou hebdomadaire, on prend le temps de parler :
– des faits divers ou marquants de l’actualité (de la famille, de son quartier, du monde),
– du travail de la classe (en cours ou futur) : ce qui est au point, ce qui traîne, ce qui demande à être précisé, ce qu’on a complètement oublié et qui était pourtant programmé…
5. Les conseils
Au collège, ils ont lieu à la demande d’un ou plusieurs enfants, ou d’un ou plusieurs enseignants. Dans les classes primaires ils ont lieu de façon très régulière. On y traite aussi bien des problèmes relationnels entre enfants, entre classes, entre élèves et enseignants, que des informations et projets ayant trait à la vie de la classe (fonctionnement, règles de vie, manifestations, fêtes…).
Vivre ensemble
1. Les charges ou services
L’école est le lieu de chaque enfant ; c’est aussi celui de tous, adultes et enfants. Dès la plus petite classe, les enfants sont amenés à vivre l’école comme un espace commun.
L’appropriation de cet espace partagé est fondamentale. Se sentir bien dans le lieu école a très vite comme corollaire l’acceptation de certaines contraintes, utiles au bien-être de tous.
Ranger, même si on n’est pas l’auteur du désordre, contribue à ce que la vie dans la classe soit plus agréable pour tous. Le moment collectif de rangement après les activités libres du matin en maternelle est ainsi conçu par tous comme une activité à part entière. Et très vite l’enfant se rend compte de l’importance de sa contribution au service du groupe.
De même, c’est cette idée de l’utilité de chacun, de sa participation active au fonctionnement de la classe et de l’école qui est sous-jacente à de multiples et humbles actions. Cette participation se traduit par l’attribution de «charges» ou de «services» que chaque enfant doit assurer à son tour. Dans la classe, ces services sont de l’ordre du rangement, de la vérification du matériel commun, du soin aux plantes et aux animaux.
Dans l’école, ramasser les papiers dans la cour, mettre et débarrasser le couvert, servir à la cantine, s’occuper des poules, entretenir le jardin, installer la sieste des petits sont autant de tâches dont les enfants sont responsables.
Pour les adultes, c’est surveiller la cantine ou la sieste, accompagner les enfants au bois pendant le temps de midi, recevoir en rendez-vous les futurs parents, s’occuper des commandes, gérer le stock de fournitures ou entretenir le matériel commun. Tout n’est possible que parce que chacun y contribue.
2. Les seuils de tolérance
Le mur à graffitis
Comme partout, collège aidant, nous avons quelques graffiteurs impénitents mettant autant de bonne volonté à effacer leurs traces que d’ardeur à recommencer dès que tout est remis en état. Las des nettoyages perpétuels et des dépenses entraînées, nous avons donc réservé une partie d’un mur d’enceinte de l’école aux graffiteurs de tout poil. La surface offerte est limitée à une zone qui n’entre pas dans le champ visuel de nos voisins ; elle est «remise à neuf « avec les enfants, lorsqu’ils estiment que le point de saturation est atteint. Il reste bien sûr, encore quelques «débordements», mais peu importants.
Classe ouverte / école ouverte
L’école n’est jamais fermée dans la journée. Rester à l’intérieur alors que l’échappée est possible est une loi implicitement admise et généralement respectée malgré la grande tentation de l’épicerie voisine très bien achalandée en sucreries. Dès l’ouverture de l’école, les enfants peuvent aller dans leur local ou dans celui du copain, la seule contrainte étant celle d’activités calmes. De même, les enfants ont accès librement au secrétariat et à la salle des maîtres où ils sont assurés d’y trouver quelqu’un qui pourra répondre à leurs demandes ( se faire soigner, retrouver un vêtement, téléphoner…).
Bruit ? Silence ? Déplacement ?
Permettre à l’enfant de manipuler, d’expérimenter, de se déplacer, de travailler avec un autre ou au sein d’un petit groupe entraîne des prises de paroles simultanées, des échanges nécessaires qui se traduisent par un certain brouhaha. Ce bruit-là ne traduit pas d’agitation particulière et ne pose pas de problème à priori.
Le bruit ne devient insupportable que lorsqu’il n’a pas de rapport avec l’activité. Dans ce cas, l’adulte intervient pour rappeler ce qu’il y a à faire et dans quelles conditions.
S’il y a du bruit dans nos classes, il y a aussi des temps de silence, d’autant moins problématiques qu’ils ne sont pas exigés à longueur de journée mais liés à des activités spécifiques le nécessitant : enfant plongé dans son travail, groupe classe à l’écoute d’un enfant ou de l’adulte, à l’occasion de la présentation d’un travail, d’un projet, de l’exposé d’une démarche, d’une synthèse, d’une explication.
Les déplacements dans les classes et dans l’école sont possibles à tout moment: (donc pas d’heure fixe pour aller aux toilettes, possibilité d’aller boire, se rafraîchir ou même faire un petit tour afin de se calmer).
3. Les limites
Il y a des limites écrites : les règles de vie, basées sur le droit de chacun d’exister en respectant les autres et les lieux. Elles sont communes à l’ensemble des personnes qui vivent dans l’école, établies en début d’année par le conseil des enseignants, explicitées au niveau de chaque classe, communiquées aux familles, modifiables en cours d’année en cas d’inadéquation.
Ponctuellement, des classes peuvent se donner des règles de vie de classe, règles décidées au cours d’un conseil.
D’une manière générale, les règles sont comprises, acceptées par tous et donc respectées, même s’il peut y avoir des transgressions.
4. Les conflits
Le conflit est une réalité inhérente à une vie collective. Il n’est donc pas nié, et il est important, une fois chacun rétabli dans son calme et son intégrité, de remettre face à face les protagonistes.
Tous les enseignants de l’école sont de possibles médiateurs car tous prennent en charge la vie quotidienne et peuvent intervenir auprès d’enfants dont ils n’ont pas directement la responsabilité.
Enfants et adultes sont pris en compte en tant qu’individus et ont donc les mêmes droits (à la parole, au questionnement, à une éventuelle contestation), mais aussi les mêmes devoirs, en particulier le respect des règles, des autres, des lieux, des contrats. En cas de conflit entre enfants, l’adulte amène les enfants à parler, à donner leur point de vue, et ce, dès le plus jeune âge, dans le but de trouver une solution qui satisfasse chacun et soit conforme aux règles établies.
L’adulte a un rôle de médiateur : le fait de parler est déjà en soi une grande part de la résolution du conflit, puisque confronter les récits permet bien souvent de mettre à jour les torts respectifs. D’une manière générale l’adulte est également le garant de la loi.
Ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ait toujours raison en cas de conflits entre adulte et enfant.
5. Les sanctions
Lorsqu’il y a transgression de la règle, celle -ci est rappelée ainsi que les motifs qui ont amené à l’établir.
Il peut y avoir des transgressions répétées qui dérangent les autres dans leurs activités : «l’intéressé» est alors rappelé fermement à l’ordre, éventuellement dirigé vers une autre activité, ou isolé momentanément – sur place ou ailleurs – histoire de réfléchir au calme, de laisser les autres travailler.